Depuis 2023, plusieurs compagnies d’assurance annoncent des restrictions d’accès ou des fermetures temporaires sur les fonds euros. Les versements sont orientés vers d’autres supports, moins garantis. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) alerte sur les conséquences de l’environnement de taux d’intérêt pour la stabilité du secteur.
La pression sur la rentabilité des fonds euros s’accroît à mesure que les obligations détenues en portefeuille arrivent à échéance et doivent être remplacées à des conditions de marché différentes. Les souscripteurs se retrouvent face à des choix inédits concernant la gestion et la sécurisation de leur épargne.
Pourquoi les assureurs se détournent des fonds euros : comprendre les causes profondes
Les assureurs vie affichent désormais une préférence nette pour les unités de compte, délaissant au passage les fonds euros qui faisaient leur force depuis des décennies. Ce virage ne doit rien au hasard : le climat de taux, mouvant et brutal, a bouleversé l’équilibre des portefeuilles et mis à mal les recettes d’hier.
La flambée des taux obligataires, c’est le révélateur. Les portefeuilles, gorgés d’obligations souveraines et corporate souscrites à des taux minuscules, montrent désormais leurs failles. Les compagnies, sous la surveillance stricte de Solvabilité II, voient leur marge de manœuvre se réduire comme peau de chagrin. Les rendements des fonds euros peinent à rivaliser avec le livret A, dont la rémunération culmine à 3 % en 2023 : une concurrence frontale, impossible à ignorer.
France Assureurs (ex-FFA) note une baisse marquée de la collecte nette sur ces supports. Les arbitrages s’accélèrent vers les unités de compte, moins coûteuses en fonds propres pour les assureurs. Pour mieux comprendre ce phénomène, voici les principales raisons qui poussent le secteur à restreindre l’accès aux fonds euros :
- La provision pour participation aux bénéfices, outil destiné à lisser la rémunération des épargnants, montre ses limites face à la volatilité des taux.
- La pression sur les anciens portefeuilles incite les compagnies à durcir, voire fermer temporairement, les versements sur les fonds euros.
Derrière ces choix, une préoccupation domine : préserver leur solidité financière. Les exigences réglementaires, la nervosité persistante des marchés obligataires et la concurrence exacerbée du livret A rebattent les cartes. Longtemps pilier de l’assurance vie, le contrat fonds euros doit céder du terrain.
Quels risques pour les épargnants face à la remontée des taux d’intérêt ?
Pour ceux qui détiennent une assurance vie, le décor a changé. Les fonds euros, longtemps synonymes de sécurité grâce à la garantie en capital et à l’effet cliquet, voient leur attrait s’émousser. Les faibles rendements, tirés par des obligations anciennes à taux plancher, ne font plus le poids face à l’inflation. Même si la liquidité reste présente, le pouvoir d’achat de l’épargne s’amenuise au fil des années.
Dans ce contexte, les unités de compte prennent de l’ampleur. Mais cette diversification s’accompagne d’un risque nouveau : fini la sérénité des supports garantis, place à la volatilité des marchés. Les épargnants prudents, attachés à la sécurité, hésitent avant d’adopter ces nouveaux arbitrages. Dilemme classique : faut-il conserver l’assurance vie pour ses atouts fiscaux et sa souplesse, ou se tourner vers des supports à la fois plus exposés et potentiellement plus rémunérateurs ?
Quelques points de vigilance s’imposent pour naviguer dans cette nouvelle donne :
- La garantie en capital se limite aux primes versées : les éventuelles plus-values ne bénéficient pas de cette protection.
- La revalorisation annuelle dépend désormais de la capacité de l’assureur à investir sur des marchés obligataires plus performants.
- L’attrait fiscal de l’assurance vie demeure, mais la performance nette mérite d’être examinée de près.
Le code des assurances encadre les droits du souscripteur, mais il devient indispensable d’analyser la structure du contrat : l’équilibre entre fonds euros et unités de compte, les modalités de versement, la désignation des bénéficiaires. Autre point sensible : les primes manifestement exagérées, qui peuvent semer le trouble lors d’une succession si elles dépassent la logique patrimoniale ou la capacité financière de l’assuré.
Adapter son contrat d’assurance vie : conseils pratiques pour sécuriser et valoriser son épargne
Revoir la répartition : arbitrer avec discernement
Le contrat d’assurance vie se transforme. Les fonds euros, qui assuraient autrefois la double promesse de protection et de rendement, offrent désormais un compromis moins avantageux. Pour protéger votre épargne, il devient nécessaire d’ajuster la répartition entre fonds euros et unités de compte. Les assureurs proposent toute une gamme de profils, adaptés à la tolérance au risque de chacun. Mais attention : la garantie du capital ne concerne que la part investie sur les fonds euros. Le reste se joue à découvert, au rythme des marchés.
Souscrire, transmettre : maîtriser les règles successorales
La souscription d’une assurance vie ne se limite pas à la constitution d’une épargne. C’est aussi un acte patrimonial, avec des conséquences pour la transmission du capital. En matière de donation, la loi encadre strictement la prise en compte de la réserve héréditaire. Les primes manifestement exagérées peuvent être remises en cause lors du décès, au bénéfice des héritiers. L’administration fiscale, tout comme les proches, vérifient la cohérence des versements, notamment au regard de l’âge ou des capacités financières du souscripteur. Il arrive que le rachat soit partiellement réintégré dans la succession si l’équilibre n’est pas respecté.
Voici les réflexes à adopter pour sécuriser la transmission et éviter les écueils :
- Analyser la proportion des versements au regard de la situation financière du contractant.
- Désigner sans ambiguïté le ou les bénéficiaires pour prévenir tout litige.
- Se renseigner sur les incidences fiscales d’une assurance vie utilisée dans une stratégie de donation.
Personnaliser la gestion du contrat, c’est la clef. Chaque situation réclame un suivi attentif du contrat, une veille sur les clauses bénéficiaires, et une adaptation régulière à l’évolution de la loi et des besoins patrimoniaux. En matière d’assurance vie, la passivité n’a plus sa place : l’agilité devient la meilleure alliée de l’épargnant. Les vieilles certitudes s’effacent, laissant la place à de nouveaux équilibres à inventer.